Ce n’est jamais le moment d’augmenter le SMIC… Et au bout du compte les inégalités se creusent en permanence, le nombre de travailleurs pauvres explose, le chômage demeure massif – même avant la crise du Covid. Alors oui il faut augmenter davantage le SMIC, lui donner un vrai coup de pouce, et ne pas se contenter de la progression automatique.
Bon nombre des travailleurs les plus touchés par la pauvreté sont des travailleurs qui sont payés au SMIC, et d’ailleurs souvent ne travaillent pas à temps complet. Augmenter leur salaire contribue à lutter contre la précarité.
Pas mal de travailleurs essentiels sont des smicards ! Si la revalorisation de leurs rémunérations suppose des révisions de grilles salariales – réduire les écarts de rémunérations et favoriser la promotion sociale devraient être parmi les grands chantiers de la démocratie sociale – une hausse du salaire minimum aura un effet immédiat pour eux.
Enfin l’INSEE prévoyait déjà en septembre, avant la seconde vague du Covid, une baisse de pouvoir de 0,5% en moyenne pour 2020 et aussi en 2021 ; évidemment la perte est plus forte pour les bas salaires. Un coup de pouce permettrait de limiter la casse.
En réalité, c’est toujours la même antienne : il ne faut pas augmenter le « coût du travail », donc ne pas augmenter le SMIC, pour assurer la compétitivité de la France. Les Libéraux répètent à l’envie ce dogme que des gouvernements dits de gauche ont eux aussi repris en boucle !
Or les économistes sont loin d’être unanimes sur le sujet.
Ainsi l’Institut de recherches économiques et sociales (IRES) indique sur Twitter : les « effets négatifs sur l’emploi [d’un coup de pouce au SMIC] restent à démontrer », s’appuyant sur les travaux de l’économiste Michel Husson, qui indique que de « très nombreuses études empiriques conduisent (…) à une remise en cause progressive du principe selon lequel une augmentation du salaire minimum conduirait mécaniquement à des pertes d’emploi ».
Première constatation : on ne peut pas tolérer que le fameux collège des experts chargés de proposer chaque année l’évolution du SMIC soit composé de personnalités venant toutes de la même culture économique, homogènes dans leur vision libérale et peu promptes à se remettre en cause. Le pluralisme s’impose d’autant que les économistes en question n’ont pas prouvé leur efficience. Ils se sont beaucoup trompés.
Deuxième constatation : il est temps de tordre le cou à ce pseudo consensus mortifère sur la nécessité de baisser le coût du travail pour relancer l’économie et regagner de la compétitivité industrielle… il n’en est rien ! Plus on multiplie les baisses de cotisations, plus on modère les salaires, plus le pays s’appauvrit et nos entreprises continuent les délocalisations… Les causes sont ailleurs, les actions à mener sont d’un tout autre ordre : ciblage des aides, stratégie de filières, recherche, robotisation et numérisation, made in France, protectionnisme solidaire, etc. Rajoutons à cela que l’essentiel des salariés au SMIC sont dans des secteurs de services peu engagés dans la concurrence mondiale.
Arrêtons les méthodes qui échouent … et plus grave qui fragilisent le pays et les conditions de vie de tant de Français ainsi que leur moral.
Je lis, ici ou là, que le coup de pouce au SMIC ne serait pas nécessaire pour relancer la consommation car pendant la crise du Covid les Français ont accru très fortement leur épargne… le seul problème est que si les plus aisés et une partie des catégories moyennes ont pu épargner davantage (mais ce sont surtout les très riches qui l’ont fait), de l’autre côté, les plus pauvres et les couches populaires, eux, se sont plutôt endettés… outre le côté scandaleux de cette dissymétrie et du fossé qui se creuse entre deux France, il est loin d’être évident que les très riches vont fortement et spontanément déstocker leur épargne en consommant. Tandis qu’une augmentation des bas salaires se transformera immédiatement en achat de biens et de services. Qui plus est si l’on veut rendre accessible les produits les plus écologiques et le made in France pour tous, le niveau du pouvoir d’achat compte.
Enfin on voit bien qu’un autre argument a pesé sur les choix du gouvernement… En augmentant les salaires, on fait croître le coût pour la puissance publique du chômage partiel, qui risque de durer, hélas, encore un certain temps…
C’est bien là qu’apparaît un point majeur, une tare originelle des politiques néolibérales poussées à leur paroxysme sous Macron : le refus de la redistribution des richesses, de taxer davantage les plus riches qui accumulent les fortunes et d’engager, à défaut d’une refondation fiscale, une taxation exceptionnelle des plus aisés et des entreprises qui se sont enrichies pendant la crise… Là aussi la thèse du ruissellent, des ponts d’or fait aux riches pour investir en France, est battue en brèche. Même les retours de quelque « exilés fiscaux » sont loin de compenser la perte de recettes résultant de la suppression de l’ISF. Mais pour Macron et les libéraux on ne change ni une équipe, ni une stratégie, qui perd …
Vite changeons ! Vite augmentons le SMIC !