Interrogations sur les 1,7 Milliard d’allègement fiscal dont a bénéficié la Société Générale, après l’affaire Kerviel.

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Hommage à Victor HugoLe Sénat a mis en œuvre une commission d’enquête sur le rôle des banques dans l’évasion fiscale. Le rapporteur est Monsieur  Bocquet du groupe PC et présidée par François Pillet Du groupe UMP. La commission doit voter son rapport  avant le 10 Octobre. Membre de  cette commission, j’ai participé hier soir à l’audition fort intéressante  de Pierre Moscovici

J’ai évoqué plusieurs sujets comme la loi dite du droit de suite mise en place aux USA et qui compléterait judicieusement la règle FACTA de transmission automatique des mouvements de fonds entre établissements bancaires dans un autre pays. J’ai demandé une information sur la mise en œuvre de la taxation des transactions financières toujours en tractation à Bruxelles. J’ai souligné la nécessité de consolider les moyens des services de contrôle et de surveillance du ministère des finances pour anticiper les contournements que les fraudeurs, certains conseils et des banques inventent très vite dés que les lois se durcissent. Enfin, j’ai interrogé Le ministre sur les conditions dans lesquelles les établissements bancaires bénéficient de réductions d’impôts lorsqu’ils sont sensés subir une fraude. En effet, j’ai appris que la société générale avait bénéficié d’un allégement fiscal  1,7 Milliard pour compenser les pertes qui auraient été générées par la fraude imputée M Jérôme Kerviel.

Or à y regarder de plus près, il paraît indispensable d’analyser précisément si ce remboursement très généreux pour la Société Général est juste, légitime et calculé rigoureusement.

C’est, dans cet esprit, que j’ai  écrit au ministre des finances, il y a quelques jours.

 Ce soir j’ai interrogé Pierre Moscovici sur cette situation. Il m’a indiqué qu’il allait répondre à mon courrier, après une étude sérieuse, dans le respect du secret fiscal.

 Voici le texte de la lettre que j’ai fait parvenir au ministre des finances.

« Monsieur le Ministre,

Je me permets de solliciter votre attention sur la réduction d’impôts de 1,7 Milliard d’Euros dont a bénéficié en 2008 la Société Générale. Cet établissement bancaire a fait valoir une perte d’environ 4,9 Milliards,  qui aurait été causée par des pratiques frauduleuses dont elle estime avoir été victime.

Cette disposition fiscale existe lorsque la fraude est constituée et lorsque deux conditions sont strictement réunies à savoir d’une part qu’il soit établi que le fraudeur n’ait bénéficié d’aucune complicité hiérarchique, d’autre part qu’il soit certain que les systèmes de contrôles ne connaissent  pas de faille.

Ces deux exigences sont établies par un arrêt du Conseil d’Etat du 05/10/2007.

S’agissant des pertes annoncées par la Société Générale en raison d’une fraude imputée à Monsieur Jérôme Kerviel, on peut s’interroger sur le respect effectif de ces deux conditions fixées par le conseil d’Etat.

Sur le premier point, en mars 2008, date où les services et la Ministre des finances de l’époque ont accepté l’allégement fiscal, il semblait très hasardeux pour l’exécutif de préjuger de l’absence de complicité hiérarchique, alors même que l’instruction avait commencé depuis à peine quelques semaines et qu’aucun jugement n’était arrêté.

Sur le second point, on peut plus que s’étonner du fait  que le ministère des finances ait pu estimer que le système de contrôle de la Société Général n’ait connu aucune faille, alors même qu’à la même période, la commission bancaire condamnait d’une amende cet établissement bancaire pour des défaillances de son contrôle.

Ainsi, il semblait pour le moins prématuré et peut être même difficilement fondé d’accorder cette réduction d’1,7 milliard d’euros en 2008 à la Société Générale. Il ne s’agit pas d’une petite somme. Elle serait très utile à l’équilibre des comptes du pays. Aussi je vous serais très obligée de bien vouloir m’indiquer quelles démarches le ministre des finances pourrait entreprendre pour vérifier si cet allégement fiscal était justifié et si tel n’est pas le cas pour recouvrer la somme indûment versée.

Enfin, au-delà du principe du bien fondé d’un tel allégement, se trouve poser une seconde question, à savoir l’établissement exacte du montant de la fraude subie qui conditionne la réduction d’impôt.

Or, à ma connaissance l’état n’a procédéà aucune expertise indépendante pour vérifier que  la somme de 4,9 Milliards de perte, déclarée par la Banque, soit bel et bien imputable aux mouvements initiés par Jérôme Kerviel. On peut imaginer que d’autres pertes aient été incluses afin de bénéficier d’un allégement conséquent. L’existence d’une expertise rigoureuse et indépendante serait d’autant plus nécessaire qu’en dépit des demandes réitérées de la défense de Monsieur Kerviel, aucune expertise sur ce point n’ait été réalisée au niveau judiciaire.

Le chiffrage n’a fait l’objet que d’un état déclaratif de la seule Société Générale. Ce qui semble insuffisant.

Vous comprendrez qu’il soit indispensable de vérifier scrupuleusement si les deux conditions fixées par le conseil d’Etat pour bénéficier d’une réduction d’impôt sur les sociétés, en raison de fraudes subies aient bien été réunies en 2008 et d’autre part si la somme calculée était fondée sur une analyse incontestable des pertes subies à ces motifs. Enfin, il paraît nécessaire de regarder si tout ou partie de l’avantage fiscal ne mérite pas d’être rembourséà l’Etat.   

Vous savez, Monsieur le ministre, l’importance que nos concitoyens attachent d’une part à la transparence des décisions publiques et d’autre part à la justice fiscale.

Cette affaire mérite une information précise et un souci de rigueur, d’impartialité qui me semble, au regard des informations qui m’ont été communiquées, avoir singulièrement manqué en 2008.

Je vous remercie par avance des informations que vous pourrez me transmettre et des dispositions que vous pourrez prendre pour que la représentation nationale soit éclairée et que les recettes fiscales de l’Etat ne soient en rien spoliées.

Je vous prie de croire, Monsieur le Ministre, à l’expression de ma distinguée considération. »

 

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